Mine d’or et enjeux sociaux: (Impacts attendus sur la vie socio-économique des femmes et des enfants)

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La découverte de l’or dans la sous-préfecture de Kounsitel dans Gaoual (Guinée) a provoqué une ruée vers l’or comme dans le far west américain avec le pétrole. Ainsi, des milliers d’hommes déferlent vers le nord-ouest du pays en quête de la richesse. Il est naturel que l’être humain aille là où il pense trouver le bien être ou ce qui lui permet de l’acquérir. 

L’impact de la mine en général et l’orpaillage en particulier est avant tout l’agression de l’environnement, la destruction de l’écosystème par le forage, le tamisage, le lavage des minerais, la coupe abusive des arbres, l’utilisation des produits chimiques, le détournement des cours d’eau bref tout ce qui modifie les caractéristiques physiques de la terre.

À côté des blessures infligées à la nature, il y a des bouleversements du système social qui s’opèrent grâce à l’activité dans la société. Et son impact (positif ou négatif) est grand sur les couches les plus vulnérables de la société notamment les personnes à faible revenu, les femmes et les enfants.

L’orpaillage en plus d’être une activité économique est aussi une activité sociale, il transforme les rapports sociaux en modifiant.

En effet, parmi les choses qui changeront dans la préfecture de Gaoual nous avons entre autres: L’explosion démographique, qui est l’arrivée massive d’un grand nombre de personnes dans un endroit donné, à Gaoual notamment et à la S/P de Kousitel , ce qui va engendrer le problème de cohabitation à cause du manque de logements entre les nouveaux venus et la population autochtone majoritairement rurale inhabituée à vivre en grand nombre dans un milieu restreint.

L’augmentation de la population peut favoriser l’émergence d’activités collatérales à l’exploitation minière contribuant ainsi au développement rapide du commerce du détail, donc dans l’immédiat la forte demande des produits renforce l’offre, et l’apparition de “bidons villes” ou quartiers précaires améliore les chiffres d’affaires des petits commerces de proximité.

Ce changement provoquera un dérèglement du tissu économique local à Kousitel ce qui ne fera pas que des heureux, jadis une économie soutenue par l’agriculture et l’élevage, va subir une rapide et profonde transformation. Certains champs céréaliers et vivriers seront transformés en mine à ciel ouvert, dont l’exploitation appauvrira le sol qui ne sera plus apte aux activités agricoles pendant plusieurs années à venir. La diminution de l’agriculture dans la préfecture occasionnera la flambée des prix des denrées alimentaires et aggravera la sous alimentation des plus démunis.

 Le flot du cash qui circule va générer des petites activités génératrices de revenus pour les jeunes et les femmes. Chez les premiers l’abandon scolaire et la baisse du niveau est à craindre, car le syndrome d’argent facile a des effets entraînants. Il suffit qu’un seul élève dans un groupe franchisse le pas pour créer l’émulation chez les autres et le retour en arrière est quasiment impossible surtout chez ceux qui sont issus de familles pauvres. Quand un enfant qui était à la charge de ses parents en devient un pourvoyeur de fonds le cartable sera définitivement rangé. La voie du travail et l’exploitation des enfants est ainsi ouverte.

Chez les femmes, il est certes une bonne nouvelle pour leur émancipation. L’émergence des gargotes autour des mines et des logements contribuera au renforcement de la capacité financière des femmes et à l’amélioration de leur condition de vie et celle de leurs familles.

Plusieurs parmi elles se retrouveront dans les mines pour le tamisage des minerais et/ou leur transport ce qui est connu dans certaines mines en Haute Guinée sous le vocable de « Djoulou Sama », c’est-à-dire tirer à la corde, qui désigne le fait tirer les seaux contenants de la terre du fond des puits pour les mettre dans les sacs ou des grosses bassines d’eau pour le lavage. Un travail pénible, éreintant et fastidieux. 

Dans ce processus, elles constituent un maillon solide dans les mines artisanales.

Ce sont elles qui remontent la terre du fond des puits creusés par les hommes, et sont rémunérées proportionnellement au nombre de seaux remontés. Soit 1/10, sur chaque neuf seaux remontés pour l’orpailleur la femme garde le dixième.

Elles travaillent souvent en équipe de femmes qui se relayent au bord du puit pendant que les autres s’occupent du transport et du lavage dont le butin est reparti d’une manière consensuelle entre elles. Et certaines femmes y arrivent en famille ( avec leurs enfants) quand la mère tire la corde les enfants font le lavage ou s’occupent des petits entre eux.

Sur le plan sanitaire, le risque sera le résultat du mauvais état des habitations, le manque d’eau potable, de toilettes, de ramassage d’ordures…. conduisant à l’apparition des maladies infectieuses et contagieuses telles que la tuberculose, la galles et autres maladies hydriques comme le choléra, le paludisme. Et en cette période de pandémie de Covid19 rien n’est rassurant en sachant que les gestes barrières ont du mal à être respectés même dans les grandes métropoles.

Par ailleurs, certaines risquent de subir ou s’adonner à la prostitution, dans des conditions hautement risquées pour la propagation des IST, MST, VIH, à cause des rapports sexuels non protégés et des conditions d’hygiène insuffisantes, sans oublier les cas de viol, d’agression sexuelle, de harcèlement sexuel…qui sont inhérentes à ces zones de non-droit.

Parmi les problèmes globaux attendus, on a l’eloignement des maris qui abandonnent leurs femmes et enfants dans leur villes d’origine, pour aller dans les mines artisanales, ce qui constituent un lourd fardeau pour ces femmes qui se retrouvent subitement avec plusieurs bouchent à nourrir seules avec des ressources insuffisantes. À Long terme, après l’épuisement des mines ces hommes sont des potentiels candidats à l’émigration clandestine ou des explorateurs d’autres mines encore plus éloignées que les premières.

Nous espérons que la fermeture de la mine décidée par les autorités est motivée par la nécessité de mettre de l’ordre dans l’exploitation de l’or en Guinée et accessoirement pour parer à certains de ces difficultés que nos compatriotes seront certainement confrontés dans la mine et ses environs.

Une analyse de monsieur Lamarana Diallo

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