Médias et femmes,  deux corps qui se repoussent en Guinée?

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En Guinée, un pays où les médias fleurissent, les femmes y existent peu. Qu’elles soient journalistes ou protagonistes, les femmes guinéennes sont quasi absentes dans les débats, mais aussi dans le traitement des plus grands sujets médiatiques.

Asmaou Barry
Asmaou Barry

Donner la parole aux femmes par des femmes, dans un monde où elles réclament leurs droits, est-elle une chose facile et faisable? Asmaou Barry, journaliste et présidente de l’Association des Professionnelles Africaines de la Communication APAC, a répondu à notre question.

Après avoir rappelé qu’il y a peu de femmes qui ont leur organe de presse, peu de femmes qui font de bons articles et reportages audiovisuels, qui sont directrices de publications ou directrices d’organes de presse, Mlle Asmaou touche la plaie. « Au sein des rédactions, les femmes journalistes signent moins souvent que leurs collègues masculins. Et lorsque l’on s’attarde sur le contenu même des publications, le déséquilibre entre la parole des hommes et celle des femmes est tel que celles-ci sont pratiquement absentes de certains types d’articles. Les articles signés par des femmes sont moins mis en valeur que ceux rédigés par leurs homologues masculins, » a-t-elle dit.

Asmaou Barry
Asmaou Barry

Parlant de la presse écrite où les femmes ne sont pas nombreuses, elle dit ceci « les UNES, espaces fortement exposés puisqu’ils déclenchent l’achat des journaux en kiosque, présentent une part moins importante d’articles écrits par des femmes que les pages intérieures. De la même façon, la représentation des femmes chute dans les articles qui valorisent les idées et la parole d’individus. Elles écrivent rarement des chroniques,  des éditos ou des tribunes. D’ailleurs, peu de femmes signent dans les colonnes des journaux. Les journalistes féminins restent concentrées dans les médias audiovisuels. Se faire entendre et se faire voir quoi!  Et là-bas aussi c’est pour présenter des flashs et des éditions. Leurs papiers reportages sont consacrés aux faits divers, divertissements. Elles sont absentes dans les émissions de débats« .

Elle appelle ces femmes journalistes à se démarquer, à être audacieuses et à exiger qu’on leur donne des sujets d’investigations, de traiter les sujets les plus importants et qu’elles aient des postes de responsabilités tout en étant capables, d’imposer leur place, d’initier des sujets et les soumettre à la rédaction. Aller jusqu’à se rebeller s’il faut, pour avoir la place qu’elles méritent, selon Asmaou Barry.

Intervention des femmes dans les médias

Asmaou ressort la faible participation de la couche féminine dans tous les domaines. « Vous êtes une femme, et vous n’êtes ni ministre, ni présidente d’une institution républicaine, il y a peu de chances que l’on parle de vous à la une d’un journal. Les femmes en politique on les compte au bout des doigts. Les opératrices économiques sont rares. Dans le domaine scientifique, il n’y a pas ou peu de femmes ingénieures. En somme, les acteurs de l’actualité restent les hommes et les journalistes peuvent difficilement contourner cet état de fait« .

Asmaou Barry
Asmaou Barry

De continuer, elle écorce l’inégalité, « bien sûr, les journalistes de presse ne sont pas les seuls responsables de cet écart de représentation. La place des femmes dans les colonnes est aussi le reflet des inégalités qui affectent tous les niveaux de la société, et qui perdurent d’autant plus que les degrés de responsabilité sont élevés, » affirme-t-elle.

Une cause d’absence des femmes dans les médias

Selon la présidente de l’APAC, certaines femmes ont peur de passer dans les médias pour peur de se ridiculiser. « Moi je dis qu’elles se trompent.  C’est en passant une fois, deux fois qu’on aura envie de mieux faire, » rassure-t-elle.

Asmaou Barry
Asmaou Barry

Asmaou Barry, regrette cette absence des femmes dans les médias tout en faisant une suggestion. « C’est très regrettable que les femmes soient absentes dans les médias. Pour moi, l’émancipation des femmes dont tout le monde parle, doit commencer par libérer la parole aux femmes. Quelque soit ce qu’on fasse pour elles, tant que les femmes ne peuvent pas exprimer librement leurs points de vue et que ça soit entendu par les uns et les autres, ça n’ira pas loin cette question d’émancipation. Parce que c’est quand on comprendra ce que vous avez envie de faire qu’on vous prendra au sérieux« .

Pour qu’il ait parité, Asmaou demande aux femmes journalistes de donner le bon exemple en commençant dans leurs organes de presse.

Aminata Diallo

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