Une décision historique. La Cour suprême des Etats-Unis a réaffirmé avec force, lundi 27 juin dernier, le droit des femmes à se faire avorter, une question passionnelle qui déchire le pays en pleine année électorale.
Cette décision majeure, arrachée à la majorité de cinq juges contre trois, est une victoire retentissante pour des millions de femmes et tous les défenseurs de l’interruption volontaire de grossesse.
Elle a déclenché des scènes de liesse chez des centaines de militantes rassemblées à l’extérieur de l’édifice aux colonnes de marbre, sur la colline du Capitole à Washington.
« L’ambiance est électrique« , confiait Nita Amar, une infirmière de 63 ans, membre du planning familial.
« On ne peut revenir au temps des avortements clandestins, effectués avec la tige métallique d’un porte-manteau. »
Barack Obama a, lui, confié dans un communiqué sa « satisfaction« . « Chaque femme jouit d’un droit constitutionnel à faire ses propres choix en matière de procréation« , a écrit le président américain.
L’arrêt de la haute cour représente au contraire un revers cinglant pour les « Pro Life« , les puissants opposants à l’IVG en Amérique, qui ont imposé de multiples restrictions à l’avortement dans de nombreux Etats conservateurs du pays.
Devant la Cour, Jonathan et Sarah Manning, âgés de 25 ans tous les deux et mariés, accusaient le coup. La jeune femme :
« Je suis atterrée. Je viens de pleurer. Combien de personnes supplémentaires vont mourir en raison de ce jugement ? »
Un désarroi partagé par Bobby Carper, 41 ans et arborant un collier affichant « Mom » (« maman« ) au milieu d’un coeur.
« Je suis profondément déçue« , confiait-elle. « J’ai constaté le chagrin et la douleur que provoquent les avortements. »
De fait, la décision rendue lundi par le Temple du droit américain dépasse très largement les frontières texanes car se faire avorter aux Etats-Unis est de plus en plus compliqué pour des millions de femmes. Cela est vrai en particulier dans les Etats conservateurs du Sud comme le Texas.
La décision de lundi « est une victoire pour les femmes du Texas et de toute l’Amérique. L’avortement en sécurité doit être un droit pas seulement sur le papier, mais en réalité« , a commenté la candidate démocrate à la présidentielle, Hillary Clinton.
Les quatre juges progressistes de la haute cour – dont Stephen Breyer – ont logiquement voté contre la loi texane, rejoint par le juge conservateur modéré Anthony Kennedy.
La Cour suprême siège à huit sages au lieu de neuf depuis le décès en février du magistrat conservateur Antonin Scalia.
Seulement une courte majorité (56%) des Américains estiment que l’interruption volontaire de grossesse devrait être permise dans la majorité ou la totalité des cas, selon une étude récente de l’institut Pew.
Ils sont 41% à penser le contraire, avec des pics chez les électeurs républicains conservateurs (68%) et les chrétiens évangéliques blancs (69%). Ce débat passionnel ne s’est jamais apaisé aux Etats-Unis, contrairement à d’autres pays développés.
En témoigne la récente indignation provoquée par Donald Trump, selon qui les femmes se faisant avorter devraient encourir « une forme de punition ». Le milliardaire s’est immédiatement rétracté.
Fin novembre, un opposant à l’avortement a lui abattu trois personnes dans un centre de planning familial du Colorado.
nouvelobs.com